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6 mois en ballade vélo autour de l'Europe
24 mai 2013

Aventure

Lorsque nous avons projeté ce voyage avec Claude, derrière le plaisir et les moments de bonheur, nous savions que les difficultés nous accompagneraient, tant par l’effort, la fatigue, les aléas météo, la dangerosité de la route….Cependant jamais nous n’aurions pensé nous mettre dans le rouge,  à altitude zéro,  face à l’océan, comme parfois en montagne.

Pour planter le décor, la veille de notre histoire, on  fait 108 km avec  la visite de Cadix.  108 bornes qui  auraient pu être prolongées de 25 si Claude n’avait pas eu la bonne idée de repérer une  navette pour traverser la baie.

 Le repas du midi étant frugal (on est en pleine pampa) on se jettera sur les délices de Cadix en attendant le bateau, ce qui fera que Claude ira se coucher après plantage de tente sans manger...fatiguée et sans appétit.

 Tout cela pour dire que la journée était  copieuse en km mais pas en nourriture. Notre petite cantine n’étant plus remplie…nous reportons  les courses à plus tard…

Le lendemain vers 11h,  nous  repartons reposés de El Puerto de Santa Maria. Toujours en pleine campagne, on trouve  cette fois un resto: repas  copieux (heureusement). 40 bornes se passent tranquille, sympa, pistes cyclables et temps correct...(hum) On arrive à Sanlucar de Barrameda sous une pluie battante.  La ville semble déserte. On cherche à traverser le Guadalquivir au niveau de son embouchure, car il n’y a pas de pont. Sur l’autre rive, c’est  un parc national, naturel et  protégé,  sorte de gigantesque Camargue.

 L’office du tourisme est fermé,  tous les magasins de bouffe aussi. On avance  et on tombe sur une fête gitane avec des   " Guarda civil" partout, drôle d’ambiance. Toutes  les femmes sont en costumes, les hommes sur des chevaux magnifiques, le tout hyper canalisé ; on comprendra le lendemain en se déplaçant sur Huelva,  le sens de cette fête.

Toujours à la recherche d’infos,  on voit des barges sur le fleuve : c’est la solution.

Eh ben non. On nous explique, que les barges sont réservées pour les gitans qui ont leur camp de l’autre côté et que l’on n’a pas le droit de passer. Claude s’énerve car elle sait que nous devons alors remonter sur Séville …il n’y a aucun pont avant. Un petit détour de  presque 3 jours !!  On  cherche une solution et… il retombe un grain, mais un gros grain.

On finit par comprendre que nous pouvons traverser dans la  " barge police". Ouf, on peut passer, alors, allons y…

Là commence l’aventure.

On pousse les vélos sur la plage (pas d’embarcadère) et à l’arrache on monte dans la barge. Super,  on blague avec la Guarda,  on se sait pas ce qui nous attend... Super, on passe de l’autre côté,  le GP m’indique une trace, la vie est belle.

La descente de la barge est sportive…on se dirige vers le camp gitan (300m plein sable). Il est déjà 16h et on essaie toujours de glaner des infos. En fait ma piste sur GPS est non seulement interdite car nous sommes dans un site protégé mais on nous fait comprendre qu’avec des vélos c’est injouable, on nous indique que le bord de plage est toléré et  que l’on doit se dépêcher,  la marée étant montante. On fond,  je suis content car j’avais relevé une trace à la maison qui  longeait la mer :   plus courte, on a le droit, on peut rouler. On négocie un peu d’eau, on file.

Re-traversée de la plage plein sable, enfin le bord de mer… on monte sur nos vélos. On fait 3 km, correct,  le 4ème en descendant et remontant dessus mille fois et ….et puis ?... on pousse !! Projection de la distance à parcourir, l’heure qui file, on fait le tour de nos réserves….on y est,  on est dedans, l’aventure nous tend les bras et la seule sortie est devant nous. L’un et l’autre on sait déjà que la nuit ne peut que nous rattraper mais on reste optimistes. On oublie juste que la mer monte inexorablement  et plus on est rejetés vers la plage plus c’est l’enfer.  On a roulé à 8 km heure, puis 5 puis 4 puis ……..brrrr

La soif nous rattrape, l’effort est très violent, on a déjà abandonné l’idée de cuire notre riz, il faut  garder notre eau. On se passera de manger, on sait faire. On aperçoit au loin une tour fortifiée, on se fixe un cap, un but, une limite, avancer le plus possible et planter le camp jusqu’à la marée descendante, on pourra alors rouler. L’effort devient infernale, 10 bornes…. mais on n’avance pas. L’océan fait un vacarme, un vent de ¾ nous lamine. Soudain je lève les yeux, je rêve, c’est une hypo….je vois une bête devant moi, à 50 m, taille basse, la queue fournie, les oreilles très pointues….un chien ?.....non, un goupil, un renard du désert, celui du petit prince, magnifique !! Il ne nous a pas sentis, ni entendus. Il se balade. Incroyable.

Ce qui devait arriver, arriva… la nuit nous rattrape. Oh,  le beau coucher de soleil, il est 21H28 et on fait quoi maintenant….on pousse. 22h  il fait quasi nuit noire, la tour se rapproche mais on a guère d’illusion, pas de route. On décide de la viser et puis de se poser. 10h30 nuit noire, il y a presque 12 h que l’on est partis, nous avons dépassé le stade de la faim, mais la soif est très présente. L’expérience montagne nous sert, on sait gérer, faire un sur-effort. Le manque d’eau devient un gros problème, le vent nous dessèche.

Des lumières au loin scintillent qui nous permettent de faire des projections, histoire d’entretenir le moral. Quelques 4*4 seront passés pendant notre galère, personnel autorisé mais ils nous ignorent. Tout cela est très dur dans la tête car on sait l’effort qui reste à fournir et nos forces  diminuent très sensiblement.

 Enfin, la tour, 20 km en 7 heures, sans commentaire. Je laisse Claude un  moment,  monte la dune… elle est si près et si loin, dans la nuit je pourrais presque me perdre. Je reviens, on fait le point et décidons d’’arrêter.

Au loin, des feux de voiture qui viennent dans notre sens. 5 mn… le 4*4 s’arrête à notre niveau, un garde qui rentre du travail. Curieux quand même dans un parc protégé ce seul passage possible sur la plage. On engage la discussion ; il faut dire qu’à cette heure- là, mon anglais teinté d’espagnol me coule de la bouche avec une telle facilité….  Je  ne savais même pas. Bref, il nous explique que la marée descend dans deux heures, que nous n’avons qu’à attendre, que nous n’avons pas le droit de camper sinon il nous verbalise et que donc tout va bien Madame la marquise. Je prétexte que ma femme est épuisée (ce n’est pas vrai, c’est moi) que dans tous les cas je vais poser ma tente et joue mon joker : on ne peut pas monter nos vélos sur la grille du toit ?

Blanc, silence de mer. Il a le choix entre nous verbaliser ou nous monter… il nous monte. Incroyable, il est 11h. On se croit tirés d’affaire…eh ben encore non. Tout en surfant sur le sable avec son engin en me disant qu’il roule lentement (on se fait du souci pour nos vélos là-haut) il me passe sur son phone une personne amie qui parle français. S’engage une conversation à trois,  pour comprendre que le camping (que nous avions projeté) est  fermé. Bref de l’endroit où il va nous déposer il nous restera encore 15 bornes jusqu’à  Matalascanas.  Super…le moral chute, d’autant que dans la voiture une douce chaleur nous enveloppe et  la fatigue nous  arrive dessus à la vitesse de la marée au galop.

Re-discussion triangulaire, finalement  ce monsieur nous déposera devant un hôtel luxe mais « very expensive ». Bon va falloir casser la tirelire.

Allez, il a dû avoir pitié de notre bourse.  Il poussera encore un peu et, nous mettra en situation de trouver un truc normal. 11H30, après force remerciements et un tas de sable laissé dans son tank, on trouve  un hôtel, exténués. On tombe sur un gardien adorable qui installe nos bécanes dans sa loge (si, si), nous ouvre le bar… Un énorme chocolat chaud pour Claude et deux bières pour moi, une  douche  bien chaude et un gros dodo, je ne vous dis même pas.

 Au final, 40 km à vélo, 20 à pousser dans le sable sur la plage, comme des oufs, 8 version surf 4*4 et encore 10 en version normale.

Altitude zéro, oui,  mais téméraires jusqu’au bout !!!

 

  

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